Juridique

Newsletter – Octobre 2025

06 Nov. 2025

Le 15 octobre 2025, l’Assemblée nationale a définitivement adopté le projet de loi portant transposition des accords nationaux interprofessionnels (ANI) en faveur de l’emploi des salariés expérimentés et relatif à l’évolution du dialogue social.

Le projet de loi renforce le dialogue social dans les branches et les entreprises sur l’emploi des seniors, avec l’obligation de négocier au moins une fois tous les 4 ans dans les branches professionnelles et, pour les entreprises d’au moins 300 salariés, d’une manière distincte des autres négociations.

Le projet de loi vise à mieux préparer les secondes parties de carrière en améliorant le lien entre les visites médicales et l’entretien de parcours professionnel. Cet entretien devra être proposé dès la première année de l’embauche du salarié, puis tous les 4 ans, avec un état récapitulatif tous les 8 ans, pouvant donner lieu à une obligation d’abondement du compte personnel de formation (CPF) du salarié en cas de manquements de l’employeur.

Un nouveau contrat de valorisation de l’expérience sera expérimenté pendant 5 ans afin de favoriser le recrutement des seniors. Ce contrat, à durée indéterminée, sera ouvert aux demandeurs d’emploi inscrits à France Travail d’au moins 60 ans, ou dès 57 ans si un accord de branche le prévoit. La mise à la retraite ne pourra être envisagée que lorsque le salarié a atteint l’âge d’un départ à taux plein. L’employeur sera exonéré temporairement de la contribution patronale spécifique de 30 % sur l’indemnité de mise à la retraite (durant 3 ans suivant la publication de la loi).

Plusieurs mesures portent sur les dispositifs d’aménagements de fin de carrière. En particulier, l’accès à un temps partiel dans le cadre d’une retraite progressive est facilité. Il sera accessible dès 60 ans (contre 62 ans aujourd’hui). Le maintien total ou partiel de la rémunération pourra être assuré par l’affectation de l’indemnité de départ à la retraite, dans des conditions définies par accord.

Le projet de loi supprime la limite de trois mandats successifs pour les élus du personnel au comité social et économique (CSE).

Le projet de loi réduit à 5 mois, au lieu de 6 mois, la durée d’affiliation pour les primo-entrants.

Le projet de loi prévoit notamment la création d’une période de reconversion permettant aux salariés, sur proposition de l’employeur, de bénéficier du financement d’une certification professionnelle ou de blocs de compétences afin d’évoluer professionnellement, au sein de l’entreprise, ou dans une autre entreprise.

Source : AN, TA n° 171, 15 oct. 2025

L’Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail (Anact) propose aux employeurs un guide visant à intégrer une évaluation différenciée des risques professionnels entre les femmes et les hommes dans le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP).

Dans de nombreuses entreprises, les femmes et les hommes n’occupent pas les mêmes postes, ne sont pas exposés aux mêmes risques, et ne travaillent pas dans les mêmes conditions. Les secteurs ou métiers à dominante féminine sont souvent associés à des risques moins visibles, parfois sous-évalués, ce qui entraîne des mesures de prévention insuffisantes.

Par ailleurs, l’exposition à un même risque peut avoir des effets différents selon le sexe, en raison de facteurs biologiques ou sociaux. Même sur un poste identique, les tâches réellement effectuées peuvent varier selon le genre, du fait d’une répartition genrée des activités.

C’est pourquoi il est essentiel de prendre en compte ces différences dans l’évaluation des risques. En les intégrant dans le DUERP, les entreprises peuvent concevoir des plans de prévention plus adaptés, qui tiennent compte des spécificités de chaque groupe. Cette approche permet non seulement de réduire les inégalités de santé, mais aussi d’améliorer les conditions de travail pour toutes et tous.

S’adressant aux préventeurs, RH, représentants du CSE pour les aider à enrichir les DUERP par une démarche d’évaluation différenciée, ainsi qu’aux experts en prévention dont les services de prévention et santé au travail afin de les outiller dans l’accompagnement de telles démarches, le guide fournit des repères pour mettre en œuvre une évaluation différenciée des risques professionnels.

Il permet en particulier de mieux prendre en compte :

  • Les écarts d’exposition entre les femmes et les hommes
  • Les impacts différenciés des risques.

Il permet ainsi de réaliser une évaluation des risques au plus près des situations de travail, formalisée dans le DUERP, et d’identifier des mesures de prévention adaptées.

La démarche proposée permet de se mettre en conformité avec les obligations réglementaires. Le Code du travail prévoit en effet, depuis 2014, que l’évaluation des risques doit intégrer « l’impact différencié à l’exposition aux risques en fonction du sexe ».

Le guide est construit en trois parties :

  • La première fait le point sur les connaissances relatives à la santé des femmes au travail et les écarts femmes-hommes. Ce sont autant de données qui peuvent être utilisées pour justifier d’enrichir les pratiques d’évaluation des risques
  • La deuxième partie détaille une méthode d’évaluation des risques en cinq phases et identifie comment mieux prendre en compte l’approche différenciée à chacune d’entre elles
  • La troisième partie est constituée de sept fiches pratiques contenant des repères par famille de contraintes de travail ou de risques pour mieux identifier les écarts possibles entre les femmes et les hommes.

Source : Min. Travail, actualités, 29 sept. 2025

Faits

En l’espèce, une entreprise avait mis en place un dispositif d’entretien de développement individuel de ses salariés. Ce dispositif est contesté par un syndicat de l’entreprise, souhaitant qu’il soit interdit et que les entretiens réalisés soient annulés.

Le tribunal de grande instance a considéré qu’un tel dispositif était illicite et a interdit à la société de l’utiliser, sans toutefois annuler les évaluations déjà réalisées. Une solution également adoptée par la cour d’appel, conduisant l’employeur à se pourvoir en cassation.

En s’appuyant sur le pouvoir de direction lui étant rattaché, celui-ci argue, d’abord, que l’évaluation des salariés peut porter sur des éléments de leur personnalité et sur leur comportement. Il reproche, ensuite, à la cour d’appel d’avoir jugé illicite dans son entièreté le dispositif alors qu’une seule partie était critiquée, à savoir l’évaluation des compétences comportementales des salariés.

Solution

Dans cet arrêt, la Cour de cassation rappelle que l’employeur tient de son pouvoir de direction né du contrat de travail le droit d’évaluer le travail de ses salariés mais que la méthode par laquelle il y parvient doit reposer sur des critères « précis, objectifs et pertinents au regard de la finalité poursuivie ».

La Cour de cassation confirme ainsi la position de la cour d’appel ayant retenu que la partie relative aux « compétences comportementales groupe » n’était ni secondaire ou accessoire, et que « l’abondance de critères et de sous-critères comportementaux » interrogent sur la garantie d’un système d’évaluation objectif et impartial.

Par ailleurs, « optimisme », « honnêteté » et « bon sens » sont autant de notions qui, utilisées sous les items « engagement » et « avec simplicité », ont une connotation moralisatrice impactant la sphère personnelle des salariés. En l’état, ces éléments ne constituent pas des critères précis, objectifs et pertinents permettant d’évaluer les compétences professionnelles des salariés ; les informations demandées devant avoir un lien « direct, suffisant et nécessaire » avec l’activité des salariés.

Source : Cass. soc., 15 oct. 2025, n° 22-20.716

Faits

Licenciée le 9 octobre 2020 pour inaptitude et impossibilité de reclassement, une salariée saisit, le 23 avril 2021, la juridiction prud’homale de diverses demandes relatives à l’exécution et la rupture du contrat de travail.

Pour condamner l’employeur au paiement d’une indemnité forfaitaire pour travail dissimulé, la cour d’appel retient que la salariée rapporte la preuve par de nombreux messages électroniques de ce qu’elle était régulièrement et directement sollicitée par l’employeur, y compris le dimanche, avec délai impératif et relance, lui reprochant le retard pris à mots couverts ce qui l’a conduite à accomplir des tâches pour l’entreprise pendant ses arrêts maladie de septembre et octobre 2019. L’arrêt ajoute que la société ne pouvait l’ignorer puisque les demandes émanaient pour beaucoup d’entre elles du dirigeant qui agissait comme si la salariée n’était pas en arrêt maladie de sorte que l’élément intentionnel ne fait pas de doute.

Solution

Saisie, la Cour de cassation désavoue les juges du fond. Elle estime que l’exécution d’une prestation de travail pour le compte de l’employeur au cours des périodes pendant lesquelles le contrat de travail est suspendu par l’effet d’un arrêt de travail se résout par l’allocation de dommages et intérêts en indemnisation du préjudice subi.

Source : Cass. soc., 24 sept. 2025, n° 24-14.134

Une salariée occupant le poste d’ « office manager », statut cadre, est placée en arrêt maladie puis licenciée pour faute grave en raison d’erreurs répétées dans l’exécution de ses tâches. La salariée soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse, car il reposait en réalité sur son insuffisance professionnelle qui, sauf abstention volontaire ou mauvaise volonté délibérée, ne constitue pas une faute. Elle réclame en outre des dommages-intérêts en réparation du préjudice que lui a causé l’exécution déloyale de son contrat de travail par l’employeur.

La salariée avait en effet été réaffectée au poste d’ « assistante comptabilité et gestion », tandis que ses fonctions d’ « office manager » avaient été confiées à une collègue nouvellement embauchée. Les deux salariées avaient partagé 26 jours de travail avant l’arrêt maladie de l’intéressée. 

La cour d’appel avait reconnu le préjudice de la salariée, mais avait limité le montant des dommages-intérêts qui lui ont été alloués à la somme de 600 €. Selon elle, en effet, le changement de dénomination du poste occupé avait certes causé un préjudice à la salariée, mais celle-ci ne rapportait pas la preuve des conséquences de ce changement sur l’étendue de ses missions. Les juges en avaient conclu que la salariée avait « seulement » subi le désagrément de se voir privée d’une désignation gratifiante au profit d’une collègue nouvellement arrivée.

La Cour de cassation censure cette décision. Elle rappelle que la qualification d’un salarié constitue un élément du contrat de travail qui ne peut pas être modifié sans son accord, et qui s’apprécie au regard des fonctions réellement exercées. Elle reproche donc aux juges du fond de s’être fondés sur le seul changement de dénomination du poste pour indemniser la salariée sans avoir vérifié si les fonctions nouvellement exercées par l’intéressée correspondaient au même niveau de qualification, de responsabilités et de rattachement hiérarchique que ses fonctions antérieures.

Depuis le 1er janvier 2025, conformément aux dispositions de la LFSS 2025, les salariés mis à disposition auprès d’un adhérent ne sont plus comptabilisés dans l’effectif Sécurité Sociale du Groupement d’Employeurs. Cette baisse d’effectif permet de nouveau aux GE de bénéficier du financement de formations via le plan de développement des compétences, notamment pour les GE repassant en-dessous du seuil de 50 salariés.

Pour autant, certains d’entre vous, repassés sous le seuil réglementaire des 50 salariés, nous indiquaient depuis plusieurs mois, se voir refuser des financements de formation débutées ou terminées avant la promulgation de la LFSS 2025. L’envoi d’une communication aux OPCO de la part du Ministère du Travail, réclamée par CRGE, n’ayant pas solutionné le problème, nous avons conseillé aux GE concernés, principalement dans le domaine agricole, d’envoyer des courriers de relance à leur OPCO.

En dépit de ces différents courriers, les GE concernés constataient toujours, à la rentrée de septembre, un refus de prise en charge des formations effectuées entre le 1er et le 30 avril 2025 au motif que leur effectif était supérieur à 50 salariés.

C’est pour cette raison que nous avons proposé à nos adhérents de mandater l’avocat spécialiste des GE, Maître Pierre Fadeuilhe, pour mettre en demeure les OPCO concernés de leur régler les sommes correspondant à l’ensemble des formations mises en place entre le 1er et 30 avril 2025.

Il était précisé dans le courrier d’avocat « qu’à défaut de règlement dans un délai de 15 jours à compter de la date du courrier, le GE se réservait le droit d’intenter une action judiciaire à l’encontre de l’organisme, afin d’obtenir le règlement des sommes dues et de faire valoir son préjudice trouvant son origine dans une réticence abusive de ces sommes ».

Quelques semaines seulement après l’envoi du dit courrier, les GE ont obtenu une réponse écrite de leur OPCO indiquant « qu’au sujet de la rétroactivité demandée, notre Direction a décidé de réviser les dossiers concernés. Le service gestion va étudier chacun des dossiers et les modifier en ce sens. Les règles de prise en charge seront celles qui étaient valides à la période de réalisation des actions concernées. »